L’outil PAD, destiné aux infirmiers libéraux effectuant des prélèvements au domicile des patients pour les LBM, a été mis au point par SIL-LAB Innovations sur une idée de son fondateur, Serge Payeur. Il est le fruit d’une aventure à la fois professionnelle et humaine au service des patients.

« La biologie, une approche inverse de celle de l’informatique »

Après une aventure informatique de jeunesse digne de Steve Jobs dans son garage (lire encadré ci-après « Peur sur Amityville »), Serge Payeur valide ses acquis en rentrant à l’Epita, une école d’ingénieurs en informatique, puis au Stevens Institute of Technology, près de New-York.

En 1995, il fait ses classes chez Accenture, gigantesque cabinet de conseil avec pour mission « d’utiliser l’informatique afin d’optimiser l’organisation des sociétés et de gagner en productivité tout en rendant le travail moins pénible ». En 2007, mû par le goût du défi, il quitte Accenture et rejoint la direction des laboratoires Cerba en tant que Directeur des systèmes d’information (DSI). « Je voulais devenir DSI qui est le poste le plus élevé dans ce domaine, justifie Serge Payeur. C’est là que j’ai découvert la biologie, laquelle se caractérise par une approche totalement inverse de celle de l’informatique. En effet, en informatique, il faut régler 80 % des problèmes les plus récurrents tandis qu’il n’y a pas forcément besoin de s’occuper des 20 % restants qui surviennent de manière épisodique. En biologie, ce sont les 10% de patients qui ne vont pas bien auxquels on s’adresse et pour lesquels on conçoit des process. C’est d’ailleurs là un cheminement complexe pour l’ADN de l’informaticien. »

« Travailler de manière connectée avec les Idel préleveurs »

En 2013, Serge Payeur fait ses cartons et réfléchit à la suite de sa carrière. « J’ai cherché du boulot une demi-journée mais je ne me voyais pas refaire des choses que j’avais déjà accomplies. J’ai donc franchi le pas en faisant ce que je voulais depuis longtemps : monter ma boîte, raconte-t-il. L'idée de l’outil PAD (pour Prélèvement A Domicile) m’était d’ailleurs venue quand j’étais chez Cerba. En connaissance de la base de données patients, je m’étais aperçu qu’il manquait des informations pour 30 % des patients, que ce soient la date de naissance, le sexe etc. Nous étions sous-traitant de LBM et l’on retrouvait le même problème chez eux aussi. Un jour, je suis allé dans une salle d’un LBM et j’ai vu plein de secrétaires ouvrir des sachets pour en sortir des fiches patients remplies manuellement lors de prélèvements à domicile et les recopier dans le SI du laboratoire. J’ai compris qu’il fallait arriver à travailler de manière directement connectée avec les préleveurs et les infirmières. »

Concevoir « un système expert pré-analytique »

Ce fils de médecin commence à rédiger ce à quoi doit ressembler le produit pour que plus aucun dossier patient ne soit incomplet et que l’on évite la perte de temps générée par leur ressaisie au laboratoire. Le but est de concevoir une sorte de « laboratoire de biologie médicale mobile, en clair, un système expert pré-analytique, sachant que cette phase a toujours été le parent pauvre de la biologie. »

 

Equipe SIL LAB Innovations

 

 

Pour mener à bien l’aventure, Serge Payeur s’entoure d’un développeur, Éric Dufour, à la tête de Selic, avec lequel il fonde, en décembre 2014, une start-up, SIL-LAB Innovations dont ils sont coactionnaires. Enfin, Pascal Guyard est le troisième maillon du trio et devient CEO de la structure. Auparavant, il travaillait en tant que commercial chez un éditeur de SI de laboratoire. C’est d’ailleurs là qu’il avait fait la connaissance de Serge Payeur.

Ce trio cogite sur le cahier des charges de l’application dématérialisée PAD à l’intention des infirmiers libéraux effectuant des prélèvements à domicile pour le compte de LBM.

Il s’agit donc de répondre aux besoins du prélèvent à domicile par le biais d’une solution connectée et fiable quels que soient les aléas du réseau. Cela induit une synchronisation avec un cloud hébergé selon les normes qui ont trait aux données de santé et lui-même synchronisé avec le SI du LBM en question. La solution PAD est ainsi née sur le principe d’une fiche de prélèvement accessible sur mobile ou sur tablette.

Un coût à l'utilisation

« Tout le monde avait déjà eu cette idée mais cela n’avait jamais été fait dans la mesure où ce marché n’avait pas été quantifié et donc que le retour sur investissement était incertain », se souvient Serge Payeur qui opte pour un mode de commercialisation fondé non pas, classiquement, sur l’achat d’une licence d’utilisation mais sur un coût au dossier.

Il ne reste plus qu’à solliciter les éditeurs de logiciels pour qu’ils acceptent la mise en place d’une interface avec PAD. Le but est d’aller vite et d’avoir toujours un temps d’avance en continuant sans cesse d’améliorer PAD sous forme de versions successives répondant aux contraintes des utilisateurs (paramètres additionnels, date de préemption du tube, code couleur patient, etc) avec comme visée d’atteindre ce Graal qu’est le zéro erreur.

« On ne s'enferme pas dans notre tour d’ivoire »

Mission accomplie. « Nous avons deux à trois ans d’avance quant aux besoins de nos clients, se félicite Pascal Guyard. Ils ont accès non pas à une simple prestation mais à une solution complète. On ne s'enferme pas dans notre tour d’ivoire. »

 

Encart           

Et si le temps où les Idel à domicile et les établissements partenaires travaillaient sans numéro de tube était révolu !? Voici venu le tube pré code-barré, qui peut être associé au patient par une simple action de scan sur l’application P-A-D de SIL-LAB Innovations. Solution déployée pour la première fois en France en partenariat avec Greiner Bio-One. Témoignages de ses premiers utilisateurs, l’équipe du groupe Biomedilam.

Le laboratoire Biomedilam, groupe Cerballiance Centre Ouest, utilise cette association de tubes pré code-barrés sur P-A-D depuis avril 2022 et ce, de manière généralisée sur ses dix sites. Biomedilam abrite ainsi le premier Système informatique de laboratoire (Sil) qui, en France, accepte de recevoir un numéro de tube qu’il n’a pas lui-même généré. Un processus qui vaut aussi bien pour les prélèvements réalisés dans ses laboratoires que pour ceux effectués par les infirmiers libéraux (lire ci-contre « Comment ça marche »). Et le jeu en vaut amplement la chandelle. « Toutes les étapes que l’on effectuait auparavant avec un papier et un crayon se font désormais sans. On passe des échantillons patient à identifier avec ses étiquettes à l’infirmière avec des tubes scannés, sans étiquettes à coller, résume Olivier Garnier, biologiste médical au sein de Biomedilam. Le paradigme est radicalement différent. On élimine les risques d’erreur d’identification liées à l’étiquette par l’Idel, d’affectation, par le secrétariat, d’un dossier à un patient qui n’est pas le bon ou encore, de mauvaise étiquette sur le mauvais échantillon attendu par le préleveur. En somme, cette solution améliore la traçabilité des prélèvements et fluidifie de manière considérable la réception et le traitement des échantillons extérieurs au laboratoire. »

« Un délai de rendu qui a diminué de 20 % »

Les chiffres en attestent. « Auparavant, le process comprenait la réception des tubes, leur enregistrement, la vérification de conformité de l’étiquetage etc. Au final, cela nécessitait 4 minutes 50 secondes par patient. Avec la solution SIL-LAB Innovations - Greiner Bio-One, on est passé à 2 minutes et 40 secondes. Ce gain de temps cumulé à chaque dossier a comme corollaire un délai de rendu qui a diminué de 20 %. Alors que nous rendions 90 % de nos résultats en 596 minutes, désormais, nous le faisons en 466 minutes. Le gain de temps, de sécurité et de qualité de la phase pré-analytique est considérable », pointe Olivier Garnier.

Finis les rejets de tubes par les automates

Ce procédé a également éliminé le risque de rejet de tubes par les automates pour cause d’impossibilité de lire l’étiquette mal collée ou le sur-étiquetage. Un cas de figure qui concernait auparavant 3 % des 4 000 tubes traités quotidiennement avec, à chaque fois, la nécessité de sortir le tube, de le réétiqueter correctement et de le replacer dans la machine. Une manipulation qui prenait trois minutes. Aujourd’hui, l’étiquetage industriel, garantissant l’unicité du numéro d’identification, apporte une réelle plus-value : il est inaltérable, toujours collé au bon endroit, de bonne qualité, insensible à l’eau et au gel hydroalcoolique. Et avec son association au dossier patient directement dans l’application P-A-D, cela est encore plus significatif pour les prélèvements à domicile ou dans des établissements partenaires.

La tâche des préleveurs facilitée

Quant aux préleveurs, leur tâche quotidienne est facilitée : « Le fait que le patient soit déjà dans la banque de données du P-A-D issue du laboratoire nous fait gagner du temps, témoigne Françoise Despres, Idel à Saint-Aubin-des-Châteaux, en Loire-Atlantique. Nous n’avons plus rien à écrire et nous avons l’assurance que le tube pré code-barré correspond à la prescription que nous avons, au demeurant, en photo et qui est transmise, avec l’ensemble des infos de prélèvement, dans le Sil. Nous n’avons plus besoin de la chercher ni de la transmettre en format papier au laboratoire. On évite au maximum la paperasserie et les erreurs qui vont avec. En outre, l’application de SIL-LAB Innovations est ergonomique et son utilisation extrêmement simple et intuitive. »

Comment ça marche ?

Dès la fabrication, une étiquette avec un code-barres unique est apposée sur les tubes Vacuette. Ce code-barres constitue un numéro d’identification unique d’échantillon spécifiant notamment la date de péremption et la nature du tube. Une fois au domicile du patient, l’Idel scanne directement avec son smartphone le ou les tubes prélevés dans le dossier du patient géré via l’application P-A-D développée par SIL-LAB Innovations. Il peut également faire une photo de l’ordonnance, de la Carte vitale etc. L’ensemble des informations patients/prélèvements renseignées sur P-A-D sont transmises automatiquement au Sil dès la fin de leur saisie. L’infirmier n’a surtout plus à demander au patient la planche d’étiquettes papier sur lesquelles sont mentionnés son prénom, son nom etc. Et donc le laboratoire n’a plus à générer ni à envoyer au patient lesdites étiquettes…

Dissocier la phase d’enregistrement et celle de réception des échantillons

Cette technique implique de créer, dans le Sil du laboratoire, un dossier patient dématérialisé prêt à recevoir les informations du/des codes-barres du ou des tubes Greiner Bio-One qui lui sont affectés par le préleveur. 

Le dossier est ainsi enregistré dans la matinée au laboratoire, par le secrétariat, et ce, avant même l’arrivée des tubes. Une fois ceux ci-livrés, il n’y a plus qu’à les rescanner pour les acquitter et vérifier l’ensemble du dossier, puis ils sont acheminés vers l’automate. La phase d’enregistrement et celle de réception des échantillons sont ainsi dissociées et donc écourtées.


Une démonstration de l’intérêt de la digitalisation du laboratoire

« L’entreprise Greiner Bio-One nous a contacté en 2018 dans l’optique de conclure un partenariat, explique Serge Payeur, co-fondateur de SIL-LAB Innovations. Le but était de développer un programme permettant de lire et d’interpréter les codes-barres sur les tubes et de les transmettre au Sil du laboratoire. Ce procédé, inversé par rapport à ce qui se fait traditionnellement, est synonyme d’avantages organisationnels. D’abord, parce que le tube est tracé avec le même numéro du début à la fin du process. C’est un gain de temps pour tout ce qui a trait à la saisie informatique. Il n’y a plus besoin de phase d’édition de codes-barres ni de pré/ré-étiquetage lorsque le tube arrive au laboratoire. Cela fait gagner de une à deux heures dans une salle de déballage. En outre, le tube pré code-barré est à la fois l’assurance que l’étiquette est bien collée et le meilleur moyen de vérifier, dès le prélèvement, la date de péremption du tube, ce qui est un critère de qualité.

« Cette innovation fait la démonstration qu’une digitalisation bien pensée du laboratoire est synonyme de gain de sécurité, de qualité, de productivité et de rentabilité. Elle est une avancée par rapport à un fonctionnement en pré-étiquetage que nous avions déjà mais qui nécessitait que l’Idel colle l’étiquette code-barres sur le tube avec les aléas associés. Grâce à cela, nous sommes ouverts à toutes les étiquettes code barrées. Celui de Greiner Bio-One ayant l’avantage de la vérification de la date de péremption et l’assurance d’un collage parfait », précise Pascal Guyard, co-fondateur et CEO de SIL-LAB Innovations.

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